Louis-Jean Thibault : Entre vifs : Poésie : Éditions du Noroît : 2025 : 88 pages

La cohérence de la démarche, la cohésion de l’ensemble, la justesse du propos. S’agissant d’un ouvrage de poésie, quelles autres qualités peut-on y retrouver ? D’un poème, pour qu’on le juge remarquable, quelles seraient les caractéristiques essentielles ? En est-il qui le soient vraiment, j’allais dire dans l’absolu, des éléments objectivement essentiels et porteurs de qualités ? Car, certes, le poème est un objet, il est là, présent sur le papier, dans le livre, se déployant sous nos yeux, que nos oreilles entendent ; il vient se loger dans notre tête, jouant avec nos sens, notre cœur et notre intelligence.

Ces derniers mots amorcent une réponse. En effet, y sont mentionnées peut-être quelques-unes des conditions requises pour pouvoir se déclarer en présence d’un véritable poème, celui-ci étant, on l’aura compris, le poème qui réellement parvient à se loger dans notre tête, à remuer nos sens, à toucher notre sensibilité ainsi que notre intelligence. Or cela, je crois, n’est possible que si le poète, d’abord confronté à ses propres exigences, en proie à ses désirs et hantises, à ses urgences et aussi à ses propres bonheurs s’adresse ensuite à nous dans le souci de jouer franc-jeu, c’est-à-dire d’assumer dans toute sa nudité, en toute lucidité, une parole réellement parlante, faisant part d’une expérience qu’il vit pleinement, puis de partager.  

Que la personne du poète soit réellement présente au cœur de sa parole et que cette parole soit l’instrument d’un accomplissement, l’action par laquelle une quête est menée, cela me paraît primordial.

Mais cela encore ne suffit pas. Une intégrité non plus ne suffit pas, pas plus que la sincérité. Intégrité, sincérité, oui, sont essentielles, et que le poème en témoigne, oui, cela semble aller de soi. Mais quoi encore ? Si je pose ces questions mille fois rabâchées, on aura compris que c’est dans l’intention d’affirmer, preuve à l’appui (elles suivront), que le recueil de Louis-Jean Thibault satisfait au plus haut degré à mes attentes de lecteur de poésie. Pourrais-je me contenter de dire simplement que ce recueil est réussi, qu’il est très beau ? Oui. Mais ce serait un peu court. Un lecteur doit justifier son enthousiasme. Sur quoi se base-t-il pour affirmer qu’un livre de poèmes est excellent ? Une tradition fort ancienne identifiait jadis deux aspects auxquels se montrer attentifs. Ils vont de soi. Ce sont le fond et la forme.

Bien malin qui affirmera qu’une forme peut être vide de sens, qu’une forme parfaite peut surplomber une absence de propos. Parler très bien pour ne rien dire, cela s’est vu et se verra encore. Il arrive à certains poètes de s’embourber dans une vaine pureté d’apparat. À quoi pour ma part je préférerai toujours, quoique maladroitement exprimé, un propos pertinent, vibrant, éclairé, éclairant. Je songe aux belles lettres d’amour criblées de fautes que Breton aimait tant. Le fond prime. Oui et non. Un poème où quelque chose est dit, qui est saisissable, qui peut être entendu, à condition que le propos en soit évidemment digne d’intérêt, porteur d’un éclairage nouveau, sensé, sensible, si grande est sa clarté, voilà un rehaussement contribuant alors à sa qualité. Un tel poème éloigne du lieu commun, de la banalité.

Mais encore faut-il réhabiliter ici le souci formel, car la forme prime également. Tout poète fabrique avec art, fabrique l’objet poétique, et comme disait l’autre remet vingt fois son ouvrage sur le métier, le métier à tisser les mots, dont le poète fait en quelque sorte son métier, sa spécialité. Entre ici une évidente part esthétique, personnelle, il va sans dire à chacun et chacune ; c’est du cas par car. Cette part hautement subjective, le sujet lecteur y est sensible, la perçoit réellement, objectivement. Certaines ficelles peuvent lui échapper ; à tout lecteur pareille maîtrise de la forme ne saute pas aux yeux, mais si le poème enchante, c’est en raison d’un sortilège dont le poète a lui seul le secret, quoique ce secret puisse lui échapper, du moins en partie : il entre dans la dextérité à manier les mots une part de magie improvisée dont le poète est parfois le premier à être étonné. L’inspiration l’entraîne parfois, loin, très loin, aux limites du non-sens.

Voilà une longue entrée en matière. Je m’en détournerai une fois rappelés ses points principaux. Nous verrons qu’ils se rapportent directement à notre poète, ce dont son art témoigne au plus haut niveau.

J’ai omis, j’en suis conscient, de mentionner tout ce qui peut entrer dans un objet poétique pour que la dénomination de poème lui corresponde pleinement, comme la mesure, par exemple, et le sens du rythme, une juste cadence, tout cela qui lui fait produire une certaine musique, sans oublier les sonorités du vers. J’ai omis également toutes les images qu’invente le poète grâce à la richesse d’un imaginaire abouté à un symbolisme s’y arrimant, l’imaginaire créant alors le symbole. J’ai omis de mentionner le ton. Il n’en est pas qu’un qui soit recommandable ou en usage, mais encore faut-il que le poète trouve chaque fois le sien, qui pour un poème sera seul à faire l’affaire, car dans le poème suivant un autre pourra s’avérer nécessaire. Sans compter le style, l’art du phrasé, court ou long, serpentant ou non. Tout cela relève sans doute de certains dons, mais des dons sans acquis demeurent impuissants.

Et pour nous en tenir maintenant au recueil de Jean-Louis Thibault, en revenant au fond et à la forme, nous pourrons désormais parvenir, dans la mesure du possible, à décrire la nature de son travail.

Dès le premier poème du recueil s’impose à nous la gravité du sujet. Dans une langue dont il faut souligner la justesse, dès le premier vers, nous sommes conviés dans le vif du sujet, au cœur de l’action : « La fin d’un amour est une incandescence. » Le narrateur, nous pourrions dire le poète, voire l’être qu’est ce poète même indépendamment de ses poèmes, un homme ici témoigne et témoignera de ce qu’il a vécu, un enfer ; il dira les flammes desquelles il lui faudra s’extraire. Son entreprise consistera à se défaire d’une emprise, d’une mainmise, d’un enfermement qui l’a contraint à habiter une maison, pour tout dire une prison, celle où l’amour le tenait enfermé. Rien ne va plus lorsque l’amour quitte la maison et cesse d’y habiter.

Dans le rabat de la quatrième de couverture, on lit ceci : « Comment peut-on s’extraire affectivement de la maison qui a abrité l’amour puis le désamour ? » Voilà qui n’est pas tant une question posée qu’une question de vie ou de mort, de vie et de mort. Après un exergue fort bien choisi, provenant d’un ouvrage de Louise Glück, la première partie du recueil qui en contient quatre, « La maison du sourd », commence par un poème intitulé « Le livre ». J’ai cité son premier vers : « La fin d’un amour est une incandescence. » Ce poème liminaire donne en quelque sorte l’argument du livre. Il précise que ce « livre à venir n’est plus celui / Du cœur qui bat la mesure ». Que veut-il dire ici au juste ? Si le recueil fournissait une page dite « Du même auteur », un indice, une piste nous serait donnée. Nous apprendrions que le poète a publié il y a quelques années un recueil intitulé Le cœur prend lentement mesure du soleil. Ce premier poème, « Le livre », établit un rapport entre deux états d’esprit, deux états de vie : la vie vécue à l’époque du recueil précédent, auquel il est fait allusion, et sa vie de maintenant, laquelle fera l’objet d’Entre vifs. Ce livre, que nous lirons, est nourri de « ce charbon ardent » qu’est la fin d’un amour. Il est « le livre de la fission du soleil. / Séparation des fossiles et du sang neuf, / Du mûrissement des fruits / Et de leur pourriture. » Voilà, entre autres, ce que nous apprend le premier poème. Une coupure a eu lieu, quelque chose a pris fin. Nous constaterons au fil des pages que le poète a quitté la maison qui occupait, si mon souvenir est bon, une place centrale dans le recueil précédent.

À sa parution, j’avais lu ce recueil qui avait fait sur moi grande impression. Je lui avais consacré un petit article que l’on peut lire sur mon blogue. Par curiosité, je viens de le parcourir. J’en retiens le passage suivant.

« Un homme est au mitan de sa vie. Il est dans sa maison. Il écrit de la poésie. Il parle fréquemment du poème, mais sans insistance. Le poème est un des éléments de sa vie, parmi les plus importants. Il ne vit pas seul, mais avec sa compagne et leurs enfants. Dans les vingt-cinq premiers poèmes du recueil, l’homme parle de « Ce que retiennent les murs » (c’est le titre de la première section de l’ouvrage). On croira à me lire que tout cela est fort trivial, il n’en est rien. À l’intérieur des murs de cette maison, il y un homme qui vit avec les siens, or comme pour nous tous, cet homme abrite en son esprit une intériorité. C’est dire que, dans la matérialité de sa maison se trouve cet homme dont la spiritualité est affaire de sentiments, d’angoisse, de réflexions et d’écriture. Une vie n’est jamais strictement matérielle. La richesse du propos tient à ce phénomène. Notre poète est un être sensible et aimant, qui pense, et qui doit par moments se retirer dans une pièce de sa maison afin de faire silence, afin de laisser place à l’élaboration du poème de sa vie, car vie et poésie chez lui sont en effet indissociables : ‘‘Tu as voulu le plus parfait silence. / Aux proches qui partagent ta vie, / Tu as demandé : oubliez-moi pour quelques heures, / Ma tête se sépare de vous et se détourne, / Je n’appartiens qu’à cette lancinante mélancolie / Qui rive ses yeux sur la blancheur alternée / De la page et des étoiles.’’ »

Cette maison si importante autrefois est devenue aujourd’hui « La maison du sourd ». Elle est « devenue l’image compressée / De la sauvagerie du monde, / Un col fermé / À la circulation des oiseaux, / À tout ce qui féconde et se multiplie. » Ce cœur qui prenait lentement mesure du soleil, le poète a dû l’enfouir « sous la terre ». Il écrit qu’il le vide. Qu’est un cœur que l’on vide ? Qu’est notre cœur lorsqu’on le vide ? Ici, « Chaque poème / Est une tentative d’extraction. » On fait le grand ménage. On vide la maison et l’on se vide le cœur.

Le livre que nous lisons évoque l’histoire d’une métamorphose, n’en raconte que des bribes, car le poète se fait très discret, demeure très secret, ayant moins pour but de se révéler aux autres que d’advenir à lui-même grâce aux poèmes qui marquent et concrétisent les étapes de sa métamorphose. À cette mort de lui-même et de ses amours succédera une renaissance. Louis-Jean Thibault sans entrer dans les détails s’en tient à l’essentiel. Cet homme qui demandait aux siens de l’oublier pour quelques heures et qui dans sa tête se séparait d’eux et s’en détournait, qu’est-ce qui au juste l’aura conduit à vivre désormais tout à fait séparé d’eux ? Nous ne le saurons pas, nous n’avons pas à le savoir. Et lorsqu’il parlera d’un « monde sans conscience / Sur lequel ne pèse plus aucune faute », il ne sera pas précisé de quelle nature seraient les fautes évoquées. Il parlera de ses « lâchetés ». On n’en saura guère davantage. Or il est clair que l’amour a pris fin ; sans équivoque le poète affirme que « Parfois l’amour n’est pas l’amour ». Le dernier vers de la première partie se lit comme suit : « Il n’y a plus de maison. »

Deuxième partie : « Échec de l’envoi ». Le poète écrit une lettre. S’agit-il de ce nouveau livre, celui qu’il écrit maintenant ailleurs que dans la maison familiale ? Destine-t-il plus ou moins ce livre à l’amoureuse d’hier ? Peut-être. Peut-être un peu : « Cette lettre ne te parviendra sans doute jamais. / Je l’ai postée d’une île dont j’ignore la latitude ». Le poème de John Donne « No Man is an Island » a eu pour premier titre « No Man is an Iland ». Il se pourrait que par moments certains hommes deviennent des îles désertes, qu’ils habitent des no man’s land. Une lettre sans destinataire, sans destinatrice, forcément, est tout de même adressée à quelqu’un (ne serait-ce qu’à soi-même ou aux lecteurs de poésie). Dans ce poème, pour la première fois apparaît un interlocuteur : « Cette lettre ne te parviendra sans doute jamais ». Et le poète ajoute, dans la seconde strophe : « Si elle arrive jusqu’à toi, ne l’ouvre pas. » Dans le poème qui suit, le poète s’adresse à nouveau à cette même interlocutrice. Le poème s’intitule « Cessation de vie commune ». La richesse de ce poème est relative au sentiment qu’il exprime, à la finesse du propos, autrement dit à sa poésie. Il faudrait le citer entièrement. Le résumé l’appauvrirait. Le poète y confesse s’être « confondu avec les débris » et que « Personne n’a signalé [sa] disparition. » À ce stade de sa métamorphose, son corps ancien est parti à la dérive, ce corps est encore plus mort que vif ; tel le cœur enfoui « sous la terre » dans un poème précédent, le poète gît encore dans la boue. Dans « Fin de la servitude », il écrit : « Sous les nappes phréatiques, / Au repos, / Immergé dans une eau / À fonds multiples : / C’est là que j’attends » … de renaître, pourrions-nous ajouter. Il fait allusion à l’époque ancienne, celle du recueil antérieur, plus souriant, celle où le cœur [prenait] lentement mesure du soleil : « Pendant tous ces étés / On m’a cru au jardin, / Homme paisible, familier, / En train d’offrir aux plantes et aux enfants / Leurs rations quotidiennes / D’eau, de sucs, de minéraux, / Alors que je dormais plus bas dans l’ombre, / Pierre desséchée. / Le mirage aussi est un étonnement, / Une déviation anormale de faisceaux lumineux. » On voit ici qu’un homme en cachait un autre. Chrysalide, de cet homme ancien, émergera un homme nouveau. Le mirage le dissimulait sans que pour autant il entrât dans cette déviation une intention manifeste de dissimulation.

Le poète a de la suite dans les idées. « La cohérence de la démarche, la cohésion de l’ensemble, la justesse du propos. »  En ces termes, je référais plus haut aux liens que tisse habilement le poète de page en page. Il a commencé cette deuxième section par une lettre. Il la termine avec un poème intitulé « L’envoi ».

Un nouveau « tu » apparaît dans le troisième mouvement du recueil. « Impératifs », tel en est le titre. Rarement intitulé a-t-il visé aussi juste. Dans cette section, le « tu » correspond au « je » du narrateur. Le « je » s’adresse la parole, s’apostrophe, soliloque, entreprend une manière de discours de motivation. Le poète s’encourage, s’aiguillonne. « Fais confiance ». « Trouve ce qui pour toi / Est invocable. / La fleur est en chemin. » « Va à la fenêtre. / Brise les murailles, / Comble les angles morts. » Il lui faut se reprendre en main, se réapproprier son existence, changer d’air, respirer en se dégageant de vieilles odeurs imprégnant sa nouvelle vie non encore tout à fait advenue. Un poème intitulé « Désinfection des lieux » témoigne de cette entreprise de libération. Pour sortir tout à fait de son cocon miteux, la chrysalide doit faire totalement peau neuve, émerger des miasmes la retenant prisonnière : « Toujours cette obsession : vivre / Dans la clarté du jour et sans souvenirs. / Pour ce faire, désinfecte les lieux / Où s’incruste la mémoire. » Encore une fois, il faudrait citer tout le poème. Comme tous les autres, il est relativement court. On verrait alors à l’œuvre cela dont tous les poèmes de ce recueil ne manquent pas de témoigner, c’est-à-dire une qualité d’écriture qu’on décrit d’ordinaire en disant d’un texte, poétique ou non, qu’on trouve là une écriture, que cela est écrit. C’est là un euphémisme, car bien entendu tout texte est nécessairement écrit. Or, on célèbre l’écrit qui s’élève au-dessus de la mêlée, voire très au-dessus des textes convenus, en déclarant à son sujet qu’on y trouve véritablement une écriture, entendons digne de ce mot. Je dois revenir ici à ce que je peinais à dire au début de ce commentaire lorsque je cherchais à préciser en quoi il est ou serait possible de « détailler » les « qualités » d’un poème sortant réellement du lot. Je hasardais comme réponse une adéquation entre l’imaginaire et le symbolique. Peut-être aussi ai-je mentionné le caractère de nécessité présidant à l’élaboration du poème, bien que cette nécessité, je le répète, ne soit pas forcément garante de qualité. Toutefois, d’une démarche poétique factice se démarque une entreprise poétique plus sincère, imposée justement par la nécessité d’en découdre avec la vie dans ce qu’elle a de plus aliénant ou, au contraire, et en disant un peu vite, d’en célébrer les beautés et les merveilles. Le maître-mot, je crois, demeure ici tout de même celui d’authenticité.

La quatrième partie du recueil, « Rien ne me divise », correspond à la réunification du sujet, à sa renaissance : « Je ne suis plus cet homme seul, / Confiné dans une chambre ». Dès lors, la chrysalide est libre.  « Enfin je me dévêts des mots / De la fatigue. »

Ai-je besoin en terminant d’insister sur la rareté de cet ouvrage ? Un grand poète nous a récemment quittés, je parle de Jacques Brault. Je crois que Louis-Jean Thibault fait partie des rares poètes dont les œuvres suscitent aujourd’hui une admiration comparable à celle que nous continuons de vouer aux écrits de l’absent.   

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Auteur : Daniel Guénette

Né le 21 mai 1952, Daniel Guénette est originaire de Montréal. Il a vécu la majeure partie de son existence dans l’arrondissement de Saint-Laurent. Après des études en lettres à l’Université de Montréal, où il obtient un diplôme de maîtrise en création littéraire, il enseigne la littérature au cégep de Granby. En 2011, il prend sa retraite après 34 années d’enseignement. À l’aube de la soixantaine, il renoue avec l’écriture qu’il avait cessé de pratiquer durant près de vingt ans. Il publie chez Triptyque deux recueils de poésie, Traité de l’Incertain en 2013 et Carmen quadratum en 2016, ainsi qu’un récit, L’École des Chiens, en 2015. Dans son œuvre antérieure alternaient ouvrages de poésie (3 titres au Noroît, 2 chez Triptyque) et productions romanesques (3 titres chez Triptyque). Ces ouvrages furent publiés entre 1985 et 1996. L’ensemble fut bien reçu par la critique. À l’occasion du vingtième anniversaire des éditions Triptyque, feu Réginald Martel écrivait : « Et on soupçonne que bien des éditeurs seraient ravis d’inscrire à leur catalogue, parmi quelques auteurs de Triptyque, le nom d’un Daniel Guénette, par exemple. » J. Desraspes a enchanté Jean-Roch Boivin : « Ce roman est un délicieux apéritif, robuste et délicat, son auteur un écrivain de talent et de grands moyens. » Réginald Martel parle d’un roman « qu’on dévore sans reprendre son souffle » ; il salue également la parution des romans qui suivent, se montrant surtout favorable à L’écharpe d’Iris. Pierre Salducci écrit dans Le Devoir un article élogieux sur ce roman : « L’écharpe d’Iris est une réussite, une petite musique qui nous parle de la nature humaine et qu’on n’arrive pas à oublier. Un roman magnifique, un vrai. Pas un phénomène de mode. Pas un produit branché et périssable. Mais de la littérature. Tout simplement. » L’École des Chiens, qui en 2015 marque le retour de l’auteur au récit, a été commentée par divers blogueurs, dont le poète Jacques Gauthier : « Ce beau récit du poète Daniel Guénette évoque, avec pudeur et humilité, les onze années vécues auprès de Max qu’il a dû faire euthanasier à cause d’un cancer. Ils sont rares de tels livres qui traitent si tendrement de la relation entre un homme et son animal de compagnie. Ça parle de vie et de mort, d’attachement et d’amitié, d’enfance et de solitude. » Pour sa part, Topinambulle écrit : « Dans ce très beau récit, un homme apprivoise doucement le deuil de son chien. À la manière de Rousseau, Daniel Guénette nous invite à le suivre dans ses promenades, dans les méandres de ses souvenirs, où l'évocation de l'ami fidèle nous servira de guide. ». Dominic Tardif, dans Le Devoir, 4 juillet 2015 a rendu compte chaleureusement de L’école des chiens. Il a souligné qu’avec ce récit, l’auteur avait produit « de la vraie littérature » : « Plus qu’un livre sur un maître et son animal, L’école des chiens célèbre le pouvoir de l’écriture qui, chez Daniel Guénette, n’aspire pas à remplacer l’en allé, mais bien à en continuer la vie. » Recommandé avec enthousiasme à ses téléspectateurs, L’école des chiens a fait l’objet d’un échange de cadeaux à l’émission LIRE présentée sur ARTV. À partir de 1975, l’auteur a collaboré à diverses revues de littérature à titre de poète et de critique. On a pu lire ses recensions dans la revue Mœbius. Pour l’une d’elles, l’auteur a été finaliste au Prix d’excellence de la SODEP 2016, dans la catégorie Texte d’opinion critique sur une œuvre littéraire ou artistique. Plus récemment, l’auteur a publié deux nouveaux titres en poésie, Varia au Noroît en 2018 et, à l’hiver 2023, La châtaigneraie aux Éditions de la Grenouillère. Pour ce recueil, le poète a été finaliste au Prix d’excellence du webmagazine La Métropole. Dans la recension que réserve à cet ouvrage la revue LQ, le critique Antoine Boisclair écrit: « Ce recueil émouvant, très maîtrisé du point de vue formel, témoigne d’un savoir-faire indéniable. » Le critique et poète français Pierre Perrin écrit dans sa revue trimestrielle de littérature, la revue française « Possibles », ne pas confondre avec la revue québécoise du même nom : « Daniel Guénette a le vers sûr, souvent proche de l’alexandrin, parfois très bref. Il sait restituer une vie, avec sa foudre, ses éclairs, et les moments de calme, voire de communion. La Châtaigneraie constitue un beau recueil presque filial. » Pour sa part, dans Le Ou'tam’si magazine, Nathasha Pemba déclare que « La châtaigneraie est un recueil de poésie qui a l’allure d’un hommage, d’un renouvellement du contrat amical. C’est une poésie ontologique qui va au fond des choses pour faire émerger l’être. Daniel Guénette une fois plus confirme qu’il est poète, le poète de l’amitié, le poète de l’altérité, le poète de l’éternité. » Outre ces recueils de poésie, l’auteur fait paraître quelques nouveaux romans. De Miron, Breton et le mythomane, paru en 2017 à La Grenouillère, Dominic Tardif écrit dans Le Devoir : « Chronique des glorioles imaginaires d’un grand taquin aimant (se) conter des histoires et fabuler une légendaire vie d’aventures, Miron, Breton et le mythomane est le carton d’invitation d’une fête organisée en l’honneur du mensonge auquel s’abreuve n’importe quelle forme de littérature digne de ce nom. » Pour sa part, Dédé blanc-bec reçoit dans Nuit Blanche un commentaire signé Gaétan Bélanger : « Le ton poétique empreint d’humour et de nostalgie adopté par l’auteur rend extrêmement agréable la lecture de ce roman émouvant. Il faut préciser que, tout d’abord, il est un peu déroutant de suivre les bonds fréquents de la narration dans le temps. Plus que de simples digressions, elles donnent parfois l’impression que l’auteur saute du coq à l’âne pour revenir aux mêmes événements, observés sous un angle différent. Mais on s’habitue vite à cette manière ou à ce style et on l’apprécie pour son originalité. Voilà donc un roman au texte minutieusement poli et se démarquant par sa qualité et son audace. » Vierge folle est le dernier roman de l’auteur. La recension parue dans Culture Hebdo se termine avec ces mots : « Nous vous laissons le soin de découvrir la conclusion. Excellent, est un euphémisme. On a adoré. » Ce roman, sans doute le meilleur de l’auteur, s’il a suscité l’enthousiasme de ses lecteurs n’a guère fait l’objet de recensions sérieuses. Pour des recensions sérieuses, il aura fallu attendre l’hiver 2023. Au billet d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie, se sera ajoutée dans Le Devoir une chronique de Louis Cornellier consacrée non pas à un roman ou un recueil, mais à un essai. Le journaliste y salue d’abord le travail entrepris par l’écrivain sur son blogue : « Fin lecteur de poésie, l’écrivain s’y impose comme un critique raffiné, érudit et amical dont le style, limpide et élégant, s’apparente à celui de la conversation relevée. Ces qualités en font une rareté dans le paysage littéraire québécois. » Puis, il rend compte de l’essai : « Dans Le complexe d’Orphée (Nota bene, 2023, 186 pages), l’écrivain se fait plus essayiste que critique en proposant « une manière de promenade » dans laquelle il tente « de saisir la nature de la poésie ». Fidèle à son approche modeste et exploratoire, il déambule en compagnie des poètes et penseurs qu’il aime afin de délimiter son objet, tout en cultivant le souci de ne pas l’enfermer. » Il conclut sa chronique en ces termes : « Partisan des « poèmes limpides » qui disent de « simples vérités », Guénette trouve dans la poésie un antidote « à l’endormissement de [ses] facultés » ou, comme l’écrit Valéry, un discours « chargé de plus de sens, et mêlé de plus de musique, que le langage ordinaire n’en porte et n’en peut porter ». Fénelon aurait aimé ce livre admirable. » La conclusion de l’article d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie était elle aussi plutôt réjouissante : « Romancier accompli (son dernier récit, Vierge folle, est paru en 2021 aux éditions de La Grenouillère), critique littéraire important (son blogue, intitulé Dédé blanc-bec, offre des comptes rendus très étoffés sur des publications québécoises), Daniel Guénette est aussi un poète qui mérite toute notre attention. »

6 réflexions sur « Louis-Jean Thibault : Entre vifs : Poésie : Éditions du Noroît : 2025 : 88 pages »

  1. Magistrale cette grille d’entre 15 et 20 qualités qui font d’un poème «un véritable poème, celui-ci étant, on l’aura compris, le poème qui réellement parvient à se loger dans notre tête, à remuer nos sens, à toucher notre sensibilité ainsi que notre intelligence».
    Rares sont ceux qui peuvent s’improviser poètes devant autant de ficelles à tirer…

    Souvent, tu en utilises une autre que tu n’as pas mentionnée à mon avis et que j’aime bien : la capacité d’évocation. Par là je veux dire cette capacité du poème de se relier aux images, aux œuvres d’autres bons poètes, renforçant ainsi son symbolisme.

    Peut-être était-elle déjà incluse dans les caractéristiques présentées?

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    1. Mon cher ami. J’ai rédigé cette recension il y a quelques semaines. Depuis, d’autres lectures ont suivi. Je ne sais pas vraiment à quoi réfère cette grille. Il faudrait que je me relise. Or j’ai du pain sur la planche. Pas le temps de revenir en arrière. Une chose est certaine, j’ai vraiment aimé le recueil de Louis-Jean Thibault. Si j’ai parlé d’une quinzaine de qualités, on les retrouve assurément chez lui.

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      1. J’ai effectivement beaucoup de retard sur le rythme effréné de Lucky Luke Daniel!
        Désolé.
        Envoyé de mon iPhone

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