Jean-François Beauchemin : Le Roitelet : Récit : Québec Amérique : Collection Littérature d’Amérique : 144 pages

Hypotypose. Voilà sans doute le seul mot rare qu’on rencontrera en lisant Le Roitelet. Il sera prononcé par le frère du narrateur qui, ce faisant, en fournira la définition. « C’est une figure de rhétorique frappante, animée. […] Les poètes le savent : recourir aux images est presque toujours un moyen de répondre non pas à une faiblesse de la pensée mais à une espèce d’insuffisance de celle-ci, qui compense alors en adjoignant aux mots l’émotion qu’elle avait d’abord choisi d’ignorer. » Les dictionnaires nous apprennent que l’hypotypose consiste en une description animée et frappante. Le narrateur a évoqué antérieurement une scène mémorable, c’était aux funérailles de sa mère. Son frère, le Roitelet, y revient en déclarant que ses propos relevaient alors de l’hypotypose.

Mentionner que les mots rares brillent par leur absence dans Le Roitelet conduit à l’observation suivante. Ce récit est d’une simplicité remarquable. Il raconte avec des mots bien ordinaires une histoire qui, pour banale qu’elle puisse paraître, est loin d’être insignifiante. Elle se résume en peu de mots. Un écrivain mène une existence tranquille. Comme Candide chez Voltaire, il cultive son jardin. Je dis Voltaire, mais songe plutôt à Rousseau, à ses rêveries, à ses promenades dans de souriantes campagnes où l’accompagnent parfois son chat et son chien plus souvent. Ce promeneur n’est pas un homme seul, il vit avec une compagne discrète et fort aimable. Il écrit tous les jours. Il en vient à constater que les jours sont courts et que ses pas le conduisent tout droit au cœur d’un avenir incertain. Il songe à ses derniers jours. Il songe également au passé. Ses morts bien-aimés l’accompagnent. L’hypotypose des funérailles en témoigne. Au sujet de sa mère, il avait rappelé les circonstances dans lesquelles elle lui avait transmis la recette de son minestrone. Enfin ! Dans sa vie, tout comme dans le récit qu’il en fait, il ne se passe presque rien, à l’exception des visites quasi quotidiennes de son frère, ce Roitelet affligé d’un mal atroce qui a pour nom schizophrénie.

Tout dans ce récit repose sur l’étroite relation unissant les deux frères. La plupart du temps, leurs jours s’écoulent tel un long fleuve tranquille. Mais bientôt s’élèvent les vents, les eaux s’agitent, survient la tempête. Le Roitelet est en crise. Rien ne va plus. Des puissances occultes lui veulent du mal. Il entend des voix. Il délire. Seul l’écrivain semble en mesure de lui porter secours. Sa grande sollicitude impressionne. Les soins qu’il prodigue à son petit frère lui sont salutaires. Et c’est un peu donnant donnant. Ce petit oiseau blessé, lui-même grandement impressionnant, se montre capable en certains moments d’éclairer la lanterne de son frère, l’écrivain. J’en veux pour preuve ses remarques relatives à la scène de l’hypotypose. Ce grand malade, souvent en proie au délire, sait, lorsqu’il n’hallucine pas, lire mieux que quiconque le monde réel. Il parle peu. Mais ses silences sont éloquents. Son frère et lui se devinent à demi-mots. Si l’aîné écrit, le cadet de son côté est un immense lecteur. Les poètes représentent dans son existence comme des bouées de sauvetage. Par temps d’accalmie, après les violentes tempêtes, la poésie l’apaise, elle lui permet de maintenir sa pauvre tête malade hors de l’eau. Il importe ici de souligner l’intime corrélation prévalant dans la constitution des deux hommes. L’un est le double de l’autre. Le malade et l’aidant naturel sont en quelque sorte des frères jumeaux. Ils se complètent comme lecteurs et écrivains se complètent. Je rappelle que le Roitelet lit et que son frère écrit. Le premier lit non seulement les poètes, mais également les ouvrages du narrateur. Il les commente et jette sur eux un éclairage si pertinent que pour la recension que voici je pourrais me contenter d’enfiler telles des perles les propos qu’il tient à leur endroit. C’est lui d’ailleurs qui conclut le récit. « Oui, presque rien n’arrive dans cette histoire, mais tout y a un sens. »  

Le sens. Quand rien ne se passe, à lui seul ou presque, confère sa raison d’être à une histoire. Pour le Roitelet, qui recourt dans son chaos à la lecture de si nombreux recueils de poésie, lire a tout à voir avec une quête de sens, mais rien, vraiment rien avec la recherche d’un divertissement. Sur ce plan, en digne émule de Pascal, il refuse de détourner son regard de la lumière que doivent impérativement lui renvoyer les livres. Il s’élève avec véhémence contre son frère qui lui a un jour proposé la lecture d’un roman destiné à lui changer les idées. Il ne l’a guère apprécié. Dans sa colère, on croirait entendre fulminer l’Antonin Artaud qui déclarait que « Toute l’écriture est de la cochonnerie. » Elle l’est pour le Roitelet si elle ne l’augmente pas. Retour à Pascal, au peu de considération qu’il accorde au divertissement. Pour des raisons analogues, ayant hautement trait à Dieu, le Roitelet réclame du sens : « Je veux que les livres changent ma vie. » Dieu est au centre du sens. Il y est dans son absence pour le narrateur, il y est dans sa trop grande distance pour le Roitelet. Les discussions entre les frères portent souvent sur ce sujet. Ah ! se dira-t-on, ce livre est un ouvrage intellectuel, il traite de questions complexes, est une manière de traité, d’essai littéraire. Mettons les choses au clair, ce serait le cas, on ne s’en plaindrait qu’à condition d’exiger que toute substance soit frappée d’interdit dans un ouvrage de littérature. Ce n’est pas là notre opinion. Où est l’action ? Où l’aventure ? On les cherchera en vain. Mais on trouvera mieux. Ce ne sera pas à la manière de Stevenson, mais on découvrira maints trésors. Ce sont des trésors d’humanité, des bijoux de la pensée, des scintillements de fleurs des champs, des lumières perçues par des regards scrutant l’immensité de la Voie lactée.

Mais diable ! Comment s’y prend-il ce Beauchemin pour nous envoûter de si aimable manière ? La réponse se trouve dans son écriture. Même s’il y a là plus qu’une question de style, son écriture, me semble-t-il, est en grande partie responsable du sentiment de bien-être que l’on ressent en parcourant son petit livre. C’est qu’il y entre une bien discrète magie, une douce sorcellerie tenant à sa nature, que je dirais toute naturelle.

Lisant Le Roitelet, devant tant de naturel, je ne puis m’empêcher de songer à Fénelon. Je reviens inlassablement à ce passage de son Projet de poétique : « Je veux un sublime si familier, si doux et si simple, que chacun soit d’abord tenté de croire qu’il l’aurait trouvé sans peine, quoique peu d’hommes soient capables de le trouver. […] Ce n’est ni le difficile, ni le rare, ni le merveilleux que je cherche ; c’est le beau simple, aimable et commode que je goûte. » Fénelon prônait une grâce sans afféteries, exempte d’ornements qui ne soient que fioritures. Il recommandait de tracer une ligne d’écriture qui soit toujours claire.

Outre la limpidité de l’écriture de Beauchemin, laquelle agrémente la lecture en raison de son charme, il convient de mentionner la brièveté de ses chapitres. Ils se déploient sur deux ou trois pages, parfois une demi-page. Ce sont des genres de fragments, chacun rédigé comme une courte nouvelle. Ils contribuent par leur précision à rendre vivants les petits tableaux que brosse l’auteur. Ces derniers ont la légèreté de l’aquarelle, puisque jamais l’auteur n’appuie sur ses mots, ne souligne à grands traits ses idées, lesquelles sont surtout des intuitions, des méditations sur le sens de la vie. Oui, il y a lieu ici de parler d’un certain naturel. En réalité, c’est un naturel de seconde nature, que seule favorise une longue pratique de l’écriture. Commentant un recueil de poèmes qu’il estime grandement, le Roitelet exprime ses vues sur l’écriture dans les termes suivants : « Ce que j’aime de ce livre, commença-t-il, c’est qu’il me raconte avec beaucoup de clarté ce que, confusément, je sais déjà. À mon avis, son auteur a dû travailler très fort pour en arriver à un tel degré d’intelligibilité. La littérature, c’est très facile quand vous ne savez pas comment faire. Mais quand vous savez, c’est plutôt difficile. »

Les deux frères exercent l’un sur l’autre une influence considérable. Le plus rationnel des deux, le plus « normal », pour utiliser un terme employé par le schizophrène, doit à son protégé jusqu’au raffermissement de sa posture spirituelle et philosophique. « Je m’en suis remis à lui comme à l’un de mes maîtres les plus sûrs. »

Je le répète, le Roitelet est un double du narrateur. Du fond de sa noirceur, il éclaire brillamment le travail d’écrivain de son grand frère. Il est son image inversée si l’on peut dire. Plusieurs passages le confirment, celui-ci par exemple. Dans un passage, le narrateur commente le travail méticuleux qu’accomplit le Roitelet dans un centre d’horticulture. Il constate que son frère s’applique à remplir scrupuleusement ses tâches. Il écrit : « Venant de lui, ce souci du détail et cette conduite structurée m’étonnent toujours. Comme si vivait en lui un autre homme luttant contre le chaos, s’efforçant de donner à sa vie un aspect plus défini, presque géométrique. Ce que je trouve intéressant, c’est que l’exact opposé se produit en moi-même : sans cesse, une volonté que je crois indépendante de moi cherche (et parvient) à perturber mon esprit peut-être trop systématique. »

Les qualités du jeune frère schizophrène sont impressionnantes à bien des égards. Elles diffèrent encore une fois de celles du narrateur. La complémentarité de leurs personnalités est saisissante. Le petit oiseau blessé dès les premières pages du livre fait montre d’une débrouillardise exemplaire. Dans la grange où les deux jeunes enfants aident un fermier, une vache vêle. Le plus jeune se porte à son secours et joue étonnamment bien son rôle de « sage-enfant ». Il aide la vache à accoucher, alors que son frère aîné est réduit au rôle de témoin passif. Des années plus tard, un oiseau se brise une aile en percutant la vitre d’une fenêtre. Encore une fois, c’est le Roitelet qui prend les choses en main. Le narrateur assiste à la scène. Il en sera de même lorsqu’un coyote sera à l’agonie. Le jeune frère le soignera. L’aîné ne possède pas de telles compétences. Image inversée, avons-nous dit.

Si au sujet de Dieu les conceptions des deux frères ne se rejoignent pas tout à fait, en revanche, ils s’entendent plutôt bien au sujet de la vie, de la poésie et de la littérature. Le Roitelet joue même un certain rôle dans un projet littéraire qu’il propose à l’écrivain : « Tu devrais écrire un livre dans lequel rien n’arrive. » Le lecteur ici ne s’étonnera pas d’être en train de lire justement un tel livre. Ce projet aura souri à l’auteur : « J’ai trouvé l’idée d’autant plus séduisante que j’ai sous la main, avec ma vie très banale, une grande quantité de matière à partir de laquelle travailler. » Avec ce projet, nous ne sommes pas très loin du livre auquel rêvait Flaubert, quoique chez lui le livre sur rien était davantage une affaire de style qu’une affaire de vie spirituelle. Chez Flaubert, le livre sur rien devait tenir en raison de ce qu’il appelait la force interne de son style. Or chez Beauchemin, en matière de style, les choses sont plus simples, j’ai parlé d’aquarelle ; en musique, je songe au Schubert de La truite. Non, ce n’est pas le style, mais bien la force de l’amour qui fait tenir ensemble les pages de Beauchemin. Il cherche à peindre des âmes simples et lucides, hommes et femmes ordinaires ayant conservé la pureté de l’esprit d’enfance, animaux aussi, domestiques et sauvages. Le chien Pablo, le chat Lennon sont des êtres introspectifs. Ils rêvent, ils pensent. Le monde aimable où ils évoluent fait songer à celui que la littérature en images offre aux jeunes enfants. Les animaux sont quasiment dotés de langage, chose certaine, ils communiquent avec le narrateur qui les aime et comprend.

Un matin, le chat accompagne l’écrivain à la pêche. Les deux sont dans la chaloupe. Enfin, au bout d’une heure, le narrateur est récompensé de sa patience, il remonte une truite à la surface et la voici qui bientôt se tortille au fond de l’embarcation. Le chat l’observe distraitement, puis passe à autre chose. Le narrateur écrit : « Je sentais que le spectacle de la montagne, à présent éclaboussée de rayons solaires, l’inspirait davantage, alimentait son esprit sans cesse hanté, ému, rieur, indigné, traversé par le doute et, surtout, imprégné de l’intense joie de celui qui ne s’habitue pas à l’inexplicable splendeur de ce Monde. » On le voit, les réflexions du chat s’accordent à celles des deux frères, à leur « secrète connivence », celle où tous deux se rejoignent dans « le sentiment tragique de la déchirante douceur du monde. » 

En tant que lecteurs, nous devons remercier l’auteur pour l’élargissement de la vision qui s’opère en nous lorsque nous lisons son Roitelet. Que nous partagions ou non sa vision du monde, force est de constater qu’il la communique de manière fort subtile. Son narrateur ne croit pas en Dieu, mais si cela se trouve, si Dieu existe, très certainement il croit en des hommes et des femmes qui vivent et sentent les choses à sa manière. Il est poète tout comme l’était le chien de son enfance : « Il y avait de l’infini dans ce regard imprégné d’une seconde conscience, d’une intuition si forte de l’invisible. » De même, le narrateur et son frère sont des hommes mus par une spiritualité qui les fait poser sur le monde des regards comparables à ceux d’un tout jeune enfant.

Le narrateur le confesse. « À bien des égards, je suis encore l’enfant solitaire qui, sur le chemin de l’école, bifurquait vers les champs pour aller s’y allonger et contempler le ciel. Bon sang, quelle est cette mince ouverture que depuis toujours je crois apercevoir tout au fond du réel, ce passage quantique menant il me semble à une vie terrestre plus humainement lumineuse ? »

En terminant, je ne voudrais pas donner à entendre qu’il ne se passe rien dans cette histoire où rien ne se passe. Il y a çà et là des scènes fortes et troublantes. On y voit même des « méchants » à qui l’on doit la vitre d’une fenêtre fracassée par une brique. Geste d’hostilité, il va sans dire. Il y a aussi d’étranges phénomènes. Les morts en songe reviennent visiter le narrateur. Et aussi, on voit passer une galerie d’êtres lumineux et aimables. Ils manifestent tous une forme de « solidarité humaine ». Ces personnages sont les voisins du couple formé par le narrateur et sa bien-aimée. Monsieur et madame Chung sont des personnages exquis. Le narrateur parle de « l’habituel et réconfortant ronronnement de bonté » de monsieur Chung. Les Vermeulen, le patron du Roitelet, le docteur Dumontier, le chien Pablo et le chat Lennon sont également fort sympathiques. Je le répète, la « solidarité humaine » est au programme. « J’essaye le plus possible de favoriser dans ma vie comme dans celle des autres les comportements affables et bienveillants. »

C’est l’amour qui soude et relie si solidement les deux frères, et c’est aussi la poésie. L’écriture du narrateur en viendra peut-être un jour à se transformer. Il n’écrira « plus que des phrases très mystérieuses, pleines de symboles et de métaphores. » Son frère lui dira : « Tu es poète, à présent ». Peut-être leurs rapports, écrit le narrateur, « en seront-ils transformés parce que la poésie sera devenue entre nous deux une espèce de territoire commun, une façon conjointe de tenter de déchiffrer l’énigme du monde. »

Monsieur Chung a lu presque tous les livres du narrateur. Il lui fait un curieux compliment. Il lui dit que la plupart sont « considérables. » C’est là un formidable compliment. En effet, les Coréens admirent le tigre qui pour eux est un animal « considérable ». Monsieur Chung use même de cette épithète pour décrire le jeune frère de l’écrivain, un homme, dit-il, animé « d’une grande force spirituelle, un tigre. »

La conversation avec monsieur Chung secoue l’écrivain : « Alors pour la première fois depuis longtemps j’ai eu envie de pleurer de joie puisque, soudainement, je n’étais plus seul à comprendre la vraie nature de mon frère. Ensuite j’ai été heureux d’être encore à mon âge à ce point capable de rire, et d’aimer les gens aussi, parce que si la vie malgré tout est belle c’est quand même en bonne partie en raison de tous ces gens considérables qui la traversent. »

Des fâcheux pourraient bouder un livre aussi beau, en raison justement de sa beauté, de la bonté qui partout l’irradie, exception faite de cette brique lancée dans la fenêtre du logis occupé par le Roitelet. Tous ne tolèrent pas la présence des « fous ». On cherchait à le chasser. Certains pourraient reprocher à Beauchemin de paver son roman de bonnes intentions, de présenter une vision idyllique de l’existence, voire de manifester de la confiance en ce qui a trait à l’avenir de l’humanité : « Je ne doute pas une seconde qu’une fois la crise actuelle passée, le Monde et l’humanité entreront du bon pied dans l’avenir. »

Mais ce roman, ou est-ce un récit ? Ce roman, dis-je, me paraît décrire la vie de manière tout à fait réaliste. Le portrait qu’il fait du jeune frère est si pertinent qu’on le croirait fait sur mesure, à partir d’un modèle que l’auteur connaîtrait dans la vraie vie. Mais la question de l’autofiction, du roman, du récit, ne doit pas évacuer le fait que toute cette histoire est essentiellement vraisemblable. Et elle se termine très bien. Je ne dirai pas comment.

Cette histoire d’amour entre deux frères se vit parallèlement à une autre belle histoire d’amour. Celle du narrateur et de sa compagne : « Récemment j’ai aperçu au coin de ses yeux de petites rides durables et je me suis souvenu que depuis le début, d’autres s’y formaient momentanément quand elle riait, comme si durant toutes ces années le bonheur s’était exercé à laisser sa trace. »

Je demande beaucoup à la littérature. La plume de Beauchemin est généreuse. Elle offre des trésors.

Avatar de Inconnu

Auteur : Daniel Guénette

Né le 21 mai 1952, Daniel Guénette est originaire de Montréal. Il a vécu la majeure partie de son existence dans l’arrondissement de Saint-Laurent. Après des études en lettres à l’Université de Montréal, où il obtient un diplôme de maîtrise en création littéraire, il enseigne la littérature au cégep de Granby. En 2011, il prend sa retraite après 34 années d’enseignement. À l’aube de la soixantaine, il renoue avec l’écriture qu’il avait cessé de pratiquer durant près de vingt ans. Il publie chez Triptyque deux recueils de poésie, Traité de l’Incertain en 2013 et Carmen quadratum en 2016, ainsi qu’un récit, L’École des Chiens, en 2015. Dans son œuvre antérieure alternaient ouvrages de poésie (3 titres au Noroît, 2 chez Triptyque) et productions romanesques (3 titres chez Triptyque). Ces ouvrages furent publiés entre 1985 et 1996. L’ensemble fut bien reçu par la critique. À l’occasion du vingtième anniversaire des éditions Triptyque, feu Réginald Martel écrivait : « Et on soupçonne que bien des éditeurs seraient ravis d’inscrire à leur catalogue, parmi quelques auteurs de Triptyque, le nom d’un Daniel Guénette, par exemple. » J. Desraspes a enchanté Jean-Roch Boivin : « Ce roman est un délicieux apéritif, robuste et délicat, son auteur un écrivain de talent et de grands moyens. » Réginald Martel parle d’un roman « qu’on dévore sans reprendre son souffle » ; il salue également la parution des romans qui suivent, se montrant surtout favorable à L’écharpe d’Iris. Pierre Salducci écrit dans Le Devoir un article élogieux sur ce roman : « L’écharpe d’Iris est une réussite, une petite musique qui nous parle de la nature humaine et qu’on n’arrive pas à oublier. Un roman magnifique, un vrai. Pas un phénomène de mode. Pas un produit branché et périssable. Mais de la littérature. Tout simplement. » L’École des Chiens, qui en 2015 marque le retour de l’auteur au récit, a été commentée par divers blogueurs, dont le poète Jacques Gauthier : « Ce beau récit du poète Daniel Guénette évoque, avec pudeur et humilité, les onze années vécues auprès de Max qu’il a dû faire euthanasier à cause d’un cancer. Ils sont rares de tels livres qui traitent si tendrement de la relation entre un homme et son animal de compagnie. Ça parle de vie et de mort, d’attachement et d’amitié, d’enfance et de solitude. » Pour sa part, Topinambulle écrit : « Dans ce très beau récit, un homme apprivoise doucement le deuil de son chien. À la manière de Rousseau, Daniel Guénette nous invite à le suivre dans ses promenades, dans les méandres de ses souvenirs, où l'évocation de l'ami fidèle nous servira de guide. ». Dominic Tardif, dans Le Devoir, 4 juillet 2015 a rendu compte chaleureusement de L’école des chiens. Il a souligné qu’avec ce récit, l’auteur avait produit « de la vraie littérature » : « Plus qu’un livre sur un maître et son animal, L’école des chiens célèbre le pouvoir de l’écriture qui, chez Daniel Guénette, n’aspire pas à remplacer l’en allé, mais bien à en continuer la vie. » Recommandé avec enthousiasme à ses téléspectateurs, L’école des chiens a fait l’objet d’un échange de cadeaux à l’émission LIRE présentée sur ARTV. À partir de 1975, l’auteur a collaboré à diverses revues de littérature à titre de poète et de critique. On a pu lire ses recensions dans la revue Mœbius. Pour l’une d’elles, l’auteur a été finaliste au Prix d’excellence de la SODEP 2016, dans la catégorie Texte d’opinion critique sur une œuvre littéraire ou artistique. Plus récemment, l’auteur a publié deux nouveaux titres en poésie, Varia au Noroît en 2018 et, à l’hiver 2023, La châtaigneraie aux Éditions de la Grenouillère. Pour ce recueil, le poète a été finaliste au Prix d’excellence du webmagazine La Métropole. Dans la recension que réserve à cet ouvrage la revue LQ, le critique Antoine Boisclair écrit: « Ce recueil émouvant, très maîtrisé du point de vue formel, témoigne d’un savoir-faire indéniable. » Le critique et poète français Pierre Perrin écrit dans sa revue trimestrielle de littérature, la revue française « Possibles », ne pas confondre avec la revue québécoise du même nom : « Daniel Guénette a le vers sûr, souvent proche de l’alexandrin, parfois très bref. Il sait restituer une vie, avec sa foudre, ses éclairs, et les moments de calme, voire de communion. La Châtaigneraie constitue un beau recueil presque filial. » Pour sa part, dans Le Ou'tam’si magazine, Nathasha Pemba déclare que « La châtaigneraie est un recueil de poésie qui a l’allure d’un hommage, d’un renouvellement du contrat amical. C’est une poésie ontologique qui va au fond des choses pour faire émerger l’être. Daniel Guénette une fois plus confirme qu’il est poète, le poète de l’amitié, le poète de l’altérité, le poète de l’éternité. » Outre ces recueils de poésie, l’auteur fait paraître quelques nouveaux romans. De Miron, Breton et le mythomane, paru en 2017 à La Grenouillère, Dominic Tardif écrit dans Le Devoir : « Chronique des glorioles imaginaires d’un grand taquin aimant (se) conter des histoires et fabuler une légendaire vie d’aventures, Miron, Breton et le mythomane est le carton d’invitation d’une fête organisée en l’honneur du mensonge auquel s’abreuve n’importe quelle forme de littérature digne de ce nom. » Pour sa part, Dédé blanc-bec reçoit dans Nuit Blanche un commentaire signé Gaétan Bélanger : « Le ton poétique empreint d’humour et de nostalgie adopté par l’auteur rend extrêmement agréable la lecture de ce roman émouvant. Il faut préciser que, tout d’abord, il est un peu déroutant de suivre les bonds fréquents de la narration dans le temps. Plus que de simples digressions, elles donnent parfois l’impression que l’auteur saute du coq à l’âne pour revenir aux mêmes événements, observés sous un angle différent. Mais on s’habitue vite à cette manière ou à ce style et on l’apprécie pour son originalité. Voilà donc un roman au texte minutieusement poli et se démarquant par sa qualité et son audace. » Vierge folle est le dernier roman de l’auteur. La recension parue dans Culture Hebdo se termine avec ces mots : « Nous vous laissons le soin de découvrir la conclusion. Excellent, est un euphémisme. On a adoré. » Ce roman, sans doute le meilleur de l’auteur, s’il a suscité l’enthousiasme de ses lecteurs n’a guère fait l’objet de recensions sérieuses. Pour des recensions sérieuses, il aura fallu attendre l’hiver 2023. Au billet d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie, se sera ajoutée dans Le Devoir une chronique de Louis Cornellier consacrée non pas à un roman ou un recueil, mais à un essai. Le journaliste y salue d’abord le travail entrepris par l’écrivain sur son blogue : « Fin lecteur de poésie, l’écrivain s’y impose comme un critique raffiné, érudit et amical dont le style, limpide et élégant, s’apparente à celui de la conversation relevée. Ces qualités en font une rareté dans le paysage littéraire québécois. » Puis, il rend compte de l’essai : « Dans Le complexe d’Orphée (Nota bene, 2023, 186 pages), l’écrivain se fait plus essayiste que critique en proposant « une manière de promenade » dans laquelle il tente « de saisir la nature de la poésie ». Fidèle à son approche modeste et exploratoire, il déambule en compagnie des poètes et penseurs qu’il aime afin de délimiter son objet, tout en cultivant le souci de ne pas l’enfermer. » Il conclut sa chronique en ces termes : « Partisan des « poèmes limpides » qui disent de « simples vérités », Guénette trouve dans la poésie un antidote « à l’endormissement de [ses] facultés » ou, comme l’écrit Valéry, un discours « chargé de plus de sens, et mêlé de plus de musique, que le langage ordinaire n’en porte et n’en peut porter ». Fénelon aurait aimé ce livre admirable. » La conclusion de l’article d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie était elle aussi plutôt réjouissante : « Romancier accompli (son dernier récit, Vierge folle, est paru en 2021 aux éditions de La Grenouillère), critique littéraire important (son blogue, intitulé Dédé blanc-bec, offre des comptes rendus très étoffés sur des publications québécoises), Daniel Guénette est aussi un poète qui mérite toute notre attention. »

2 réflexions sur « Jean-François Beauchemin : Le Roitelet : Récit : Québec Amérique : Collection Littérature d’Amérique : 144 pages »

  1. Tu fais ici une excellente lecture d’un livre en effet remarquable. Est-ce le style ou le propos ou le mariage des deux qui font de ce livre une œuvre bienveillante? J’ai adoré ce livre, et la lecture de ton commentaire si juste me rappelle qu’il serait pertinent de ne pas le ranger trop loin pour que puisse y revenir prochainement.

    J’aime

Laisser un commentaire