ENTRETIEN DE L’AUTEUR SAUVÉ DES EAUX

ENTRETIEN DE L’AUTEUR SAUVÉ DES EAUX

Un journaliste étranger eut un jour l’excellente idée de ne pas donner suite à un entretien que je lui avais accordé. La chose devait être publiée, elle ne le fut pas. Je remercie le journaliste d’avoir laissé le temps faire son œuvre et la poussière recouvrir notre échange. J’en étais venu à l’oublier. Je m’en suis souvenu l’autre jour. Après de longues recherches, je l’ai retrouvé.

Ce qu’on lira ci-dessous est franchement mauvais. Mes pires défauts d’écrivain s’y affichent. Ce n’est qu’aujourd’hui qu’ils me sautent aux yeux. Je les prenais sans doute pour des qualités. Les voici exposés au grand jour : manque de simplicité, de naturel ; style ampoulé, syntaxe contournée, classicisme boiteux, vieillot ; adjectifs, adverbes nombreux. On me croira ou non, mais même en remaniant ces réponses, je ne parviens pas aujourd’hui à les épurer, à les débarrasser du trop qui les encombre, à réduire leur longueur, à leur soutirer tout ce qu’elles ont de factice et d’artificiel.

Je le répète, ce qui suit vient de faire l’objet d’une révision. La version qui devait paraître était encore plus déplorable.

On me demandera pourquoi je publie aujourd’hui ce torchon si bien léché. Eh bien ! En m’inoculant ce poison, peut-être pourrai-je me prémunir contre la fâcheuse tendance que j’ai à sur-écrire. C’est aussi un peu par masochisme que je livre ici ce texte en pâture, pour avouer devant tous et toutes ma tendance ridicule à me prendre pour un autre, à me présenter en public vêtu d’un costume dont l’élégance ne dévoile qu’un malheureux manque de naturel.

NOTE : J’interviendrai à l’occasion en mettant entre parenthèses et en majuscule le mot rire quand le ridicule manquera de me faire mourir de rire. Bien entendu, lecteurs et lectrices ont le loisir d’ajouter leurs rires aux miens.

1 – La première question portait sur les arts et les lettres. Le journaliste désirait savoir ce qu’ils représentaient pour moi.

Qui respire ne se demande pas s’il a des poumons, au demeurant ne se faisant d’eux qu’une vague idée, plus précise lorsque sa mémoire est bonne, car nous avons tous plus ou moins souvenir de nos lointaines leçons d’anatomie ; à plus forte raison, les spécialistes de la santé sont au fait de ces réalités, vitales, c’est le moins qu’on puisse dire.

L’écrivain que je suis écrit comme il respire. Il ne cherche pas forcément tous les jours à se représenter ce que sont pour lui les arts et les lettres. Pourtant, voici une question qui nous y oblige. Voyons de quoi tout cela retourne.

Personnellement, je vois en cette forme d’engagement que sont les arts et les lettres une manifestation de ce que je nommerais un émerveillement de la conscience, à tout le moins le travail acharné que celle-ci doit exercer si l’on tient à la vie. L’artiste plonge au cœur de la réalité brute et immédiate, dans le creuset où s’enflamment les conflits du vivant et de la mort (RIRE). Il a souci de créer quelque chose qui soit comme une rose, une source ou même un peu de lumière. Sans nécessairement en être conscient, il entreprend une quête. Cette dernière est de l’ordre du sacré, c’est dire qu’elle est également politique (RIRE).

Je confonds peut-être tout, mais à mon avis, l’artiste, qu’il soit poète, peintre, musicien, qu’il exerce l’art de la danse ou s’abandonne corps et âme au théâtre et que sais-je encore … l’artiste est celui ou celle qui par ses interventions tente de saisir et d’exprimer du sens. Il n’ignore pas l’importance de la beauté. S’il donne souvent la primauté à ses démons, c’est qu’à les méconnaître nous ne gagnons rien. Des vertus le préoccupent, celles de liberté, d’égalité et de fraternité (RIRE).  Les ouvrages faisant la promotion de la haine n’enrichissent jamais nos civilisations (RIRE).  Dans leur cas, le terme d’œuvre n’est pas approprié. 

2 – Que représentent l’écriture, la lecture pour vous ?

Si le commun des mortels (RIRE) est aussi commun que nous le croyons, généralisons et formulons une hypothèse qui ne semblera à personne tirée par les cheveux. Pour la plupart, les listes d’épicerie mises à part et autres choses du genre, écrire serait un geste relevant de l’intime. Dans l’ordre des sentiments, mettons ceux de l’amour, la plus intense proximité hormis celle que procurent baisers et autres caresses (RIRE), provient de la correspondance, de l’écriture des lettres d’amour. C’est le cas surtout lorsque les amants sont jeunes ou qu’une distance entre eux est imposée par la force des choses, le séjour de l’un à l’étranger les séparant ou quelque chose du genre (RIRE).  

Des solitaires — ne le sommes-nous pas tous un peu ? — des âmes (RIRE) éprouvant le besoin d’ordonner leurs idées ou leurs sentiments recourent à l’écriture de ce que justement nous appelons des journaux intimes. Bref, telle se trouve être une pratique d’écriture pour le moins répandue. À quoi s’ajoute la poésie juvénile, qui n’est certes pas étrangère à la lettre d’amour ou aux chagrins tels qu’on le voit exprimés dans les journaux intimes.   

Les écrivains ont sans doute d’abord, comme tout un chacun, recouru à ce type d’écriture que je dirais première, originelle ; je ne dis pas originale. De même que la lecture aura été source d’évasion pour la plupart, elle aura ensuite pris dans le cas des écrivains une orientation plus exigeante, ne servant non plus uniquement à les distraire, mais bien plutôt à leur permettre d’accomplir une entreprise qui justement est tout à fait contraire à la distraction. Songeons à Blaise Pascal, au passage des Pensées où il traite du divertissement. La position du philosophe oriente dans une voie opposée à celle du divertissement. L’écrivain s’accorde à cette conception de ce que j’appelais plus haut un émerveillement de la conscience. Le terme d’émerveillement peut être remplacé par celui d’élargissement. Dans ses lectures comme dans ses écritures, l’écrivain ne cherche pas à oublier la réalité, à fuir le feu intense du creuset dont je parlais ci-haut, mais bien plutôt à l’envisager, et de face autant que possible, quand bien même le risque serait grand d’y encourir maintes brûlures (RIRE).  

3 – Parlez-nous des villes que vous avez visitées et qui ont laissé une remarquable trace dans votre parcours artistique.

Quand je songe à mon existence de petit sédentaire, il m’arrive parfois de déplorer d’avoir si peu voyagé. Certes, il y eut des éblouissements. Les villes de New York, Rouen, Paris et surtout la Provence. Mais à ces villes, à celles de mon pays, j’aurai toujours préféré l’océan, la vue du grand large, les plages du Maine, celles de notre fleuve immense, le Saint-Laurent, et celle d’Étretat où le pied heurte de gros galets. J’aimai la célèbre aiguille et le sentier qui sur les hautes falaises longe la Manche.

Mais à Étretat, durant une semaine, du matin au soir je sortais peu de ma chambre. J’y rédigeais un premier roman. Mes promenades avaient lieu à l’aube et au crépuscule. Je visitai non loin de là une tombe, celle d’André Gide. Ce séjour en France avait lieu dans le cadre d’un voyage de jeunes écrivains. Nous nous rendions au Marché de la Poésie, à la place Saint-Sulpice si mon souvenir est bon. Ma femme et mes enfants étaient restés au Canada.

Aurais-je voyagé davantage si je n’avais pas été père de famille ? Je n’en sais rien. Aujourd’hui, en temps de pandémie, les corridors aériens, habituellement fort achalandés là où j’habite, sont plutôt silencieux. Ordinairement, le fréquent passage des avions au-dessus de nos têtes me rappelle que le monde est vaste. Des voyageurs venus du bout de monde atterrissent près de chez moi. Certains sont de passages. D’autres s’installent à demeure. Montréal est une ville cosmopolite. Mes voisins immédiats sont originaires de Chine. Une famille marocaine a vécu durant quelques années dans le logement situé à l’étage de leur duplex. En toutes saisons, des enfants de toutes les nations s’amusent dans les parcs de notre arrondissement. Je n’aurai pas fait le tour de la Terre, mais j’aime l’idée que mon pays soit une terre d’accueil.

4 – Que représente la beauté pour vous ?

Nous avons abordé la question du voyage. J’ai parlé de villes. De la mer. J’aurais dû mentionner la nature terrestre, ses multiples offrandes (RIRE).  J’aime les beautés champêtres autant que les sauvages. Non sans nostalgie, je pense à Rousseau et lui envie ses pérégrinations. Dans Les Confessions, il relate ses déplacements de ville en ville. Il quitte l’une et se rend dans l’autre, Lausanne, Genève, je ne sais plus. J’ai gardé par contre en mémoire le fait qu’il s’agissait pour lui de voyages pédestres (RIRE).  La beauté saisie dans de telles conditions, me semble-t-il, pouvait se déployer avec lenteur. Le marcheur, qu’il fût ou non pressé, avait le temps d’inscrire sa conscience dans les paysages ainsi traversés, d’en être pénétré pour peu qu’il fût sensible à de tels spectacles. Ces beautés d’antan, l’industrialisation les a profondément altérées. La modernité est à ce prix. Le revers positif de cette médaille veut cependant que le lointain se révèle à nous aujourd’hui par l’entremise des télécommunications. Ce que nos yeux ne voient pas directement, ils le voient depuis quelques décennies grâce à la télévision et au cinéma. L’internet s’est ajouté et prend de plus en plus le relais.

Bien entendu, la beauté qui se voit, celle des êtres, je songe à la grâce des femmes, au charme des enfants, à l’oiseau sur sa branche, au félin, à la pierre qu’admirait un Roger Caillois, à l’arbre, à la tour et son château (RIRE), également à tout ce que conçoit l’inventive architecture et qu’érige le patient labeur du constructeur (RIRE), bref les fruits de la nature (RIRE) ainsi que ceux du génie humain ne sont pas seuls à nous émerveiller (RIRE).

Des scènes de la vie quotidienne nous émeuvent. On parle de beaux gestes lorsque la compassion et la charité ou l’héroïsme les motivent. Ce sont là le plus souvent les manifestations de ces vertus, idéaux humanistes liés aux nobles élans de la Révolution française (RIRE) (RIRE) (RIRE) (RIRE). Gestes indissociables de la pensée. Gestes nés du discours. La poésie n’est pas loin, qui, portée par le chant, élève l’âme à de telles idées, à de tels sentiments (RIRE).

Le poète, un Victor Hugo par exemple, dit le monde en vers puissants. Leur séduisante beauté nous émeut (RIRE). Si en revanche le poète fait entendre les gémissements, les cris du prisonnier que l’on torture ; si le romancier ou le cinéaste exposent de pareilles laideurs à nos sens et à notre entendement, il nous semble que leur travail est nécessairement inscrit dans une lutte, un combat à mener toujours, à reprendre sans cesse afin que la beauté du monde ne s’évanouisse jamais totalement (RIRE).   

5 – Parlez-nous des livres, des films que vous avez déjà lus, vus et qui ont marqué vos pensées.

Les albums Tintin en tout premier lieu. Moment premier de la rencontre avec l’autre. Une Europe, la France, si différente de mon coin de pays. Puis, les aventures de Bob Morane. Mais bientôt, grâce au collège, tout autre chose, bien qu’à petite dose, des œuvres bien différentes. Enfin, l’exaltante rencontre des poètes, Verlaine, Rimbaud, Baudelaire. À lui seul, ce trio infernal occultait tout le reste. Mais force fut bientôt d’admettre que les classiques ne pouvaient être balayés du revers de la main. Le merveilleux Racine, Corneille, Molière, drôle et profond, sans oublier La Fontaine dont « le Chêne et le Roseau » contient des vers parmi les plus beaux de la langue française. Tout cela s’imposa.

N’oublions pas ici les écrivains modernes à qui je dois tant, de Flaubert à Léautaud, de Breton à Bonnefoy. Mais ces noms ne sont pas forcément les plus importants pour moi, il en est d’autres qu’on pourrait leur substituer. Par exemple, dans mon coin de pays, des auteurs et autrices remarquables m’ont profondément touché, dont Jacques Ferron, Fernand Ouellette, Gabrielle Roy, sans parler de quantité de nouveaux venus dont certains sont déjà quasiment en allés, car venir au monde en littérature ne se fait pas en un seul jour et souvent, ce jour, malheureusement tarde à se lever et s’évapore aussitôt. Il y a des poètes dont je ne découvre les travaux qu’aujourd’hui ; certains ont plus de soixante-dix ans.

Quant au cinéma, si riche, si important, pour moi il se résume à un seul nom : Chaplin. Ses films m’ont fait rire et pleurer. L’artiste était un génie, un homme qui sut révéler la beauté. Truffaut en France a fait du vrai cinéma. Mais là encore, la liste est parcellaire et il y a des chefs-d’œuvre bouleversants dont j’ai oublié les titres. Ne m’en sont restés que des images furtives, des fragments d’émotions. Une ombre susurre à mon oreille le nom d’Ingmar Bergman.

6 – Parlez–nous de vos projets culturels artistiques à venir.

J’ai le projet, particulièrement naïf, de parvenir à faire oublier, grâce à une manière de puissant chant du cygne, tout ce que j’ai publié ces dernières années et même ce qui devrait paraître prochainement sous ma plume. L’idée est de pouvoir quitter ce monde l’âme en paix, en m’imaginant avoir écrit enfin quelque chose qui soit si vrai et si beau que rien n’en puisse être retranché. Beau et utile, agréable et nécessaire comme l’est une pierre ajoutée à l’édifice (RIRE). Ce sera une gerbe littéraire constituée d’un ouvrage de poésie, d’un roman et d’un essai. Des deux premiers, je n’ai aucune idée de ce qu’ils seront. Je les désire tout simplement sublimes. Du dernier, par contre, déjà en sentier, l’idée est assez claire. La poésie aura été l’aventure principale voire la raison d’être de mon existence d’homme et d’écrivain. Je désire rassembler en une poétique les diverses idées qui ont nourri ma réflexion et mon écriture poétique. Ce serait un bilan et j’y tirerais ma révérence en rendant hommage aux poètes dont je me serai nourri tout au long de ma vie.

Auteur : Daniel Guénette

Né le 21 mai 1952, Daniel Guénette est originaire de Montréal. Il a vécu la majeure partie de son existence dans l’arrondissement de Saint-Laurent. Après des études en lettres à l’Université de Montréal, où il obtient un diplôme de maîtrise en création littéraire, il enseigne la littérature au cégep de Granby. En 2011, il prend sa retraite après 34 années d’enseignement. À l’aube de la soixantaine, il renoue avec l’écriture qu’il avait cessé de pratiquer durant près de vingt ans. Il publie chez Triptyque deux recueils de poésie, Traité de l’Incertain en 2013 et Carmen quadratum en 2016, ainsi qu’un récit, L’École des Chiens, en 2015. Dans son œuvre antérieure alternaient ouvrages de poésie (3 titres au Noroît, 2 chez Triptyque) et productions romanesques (3 titres chez Triptyque). Ces ouvrages furent publiés entre 1985 et 1996. L’ensemble fut bien reçu par la critique. À l’occasion du vingtième anniversaire des éditions Triptyque, feu Réginald Martel écrivait : « Et on soupçonne que bien des éditeurs seraient ravis d’inscrire à leur catalogue, parmi quelques auteurs de Triptyque, le nom d’un Daniel Guénette, par exemple. » J. Desraspes a enchanté Jean-Roch Boivin : « Ce roman est un délicieux apéritif, robuste et délicat, son auteur un écrivain de talent et de grands moyens. » Réginald Martel parle d’un roman « qu’on dévore sans reprendre son souffle » ; il salue également la parution des romans qui suivent, se montrant surtout favorable à L’écharpe d’Iris. Pierre Salducci écrit dans Le Devoir un article élogieux sur ce roman : « L’écharpe d’Iris est une réussite, une petite musique qui nous parle de la nature humaine et qu’on n’arrive pas à oublier. Un roman magnifique, un vrai. Pas un phénomène de mode. Pas un produit branché et périssable. Mais de la littérature. Tout simplement. » L’École des Chiens, qui en 2015 marque le retour de l’auteur au récit, a été commentée par divers blogueurs, dont le poète Jacques Gauthier : « Ce beau récit du poète Daniel Guénette évoque, avec pudeur et humilité, les onze années vécues auprès de Max qu’il a dû faire euthanasier à cause d’un cancer. Ils sont rares de tels livres qui traitent si tendrement de la relation entre un homme et son animal de compagnie. Ça parle de vie et de mort, d’attachement et d’amitié, d’enfance et de solitude. » Pour sa part, Topinambulle écrit : « Dans ce très beau récit, un homme apprivoise doucement le deuil de son chien. À la manière de Rousseau, Daniel Guénette nous invite à le suivre dans ses promenades, dans les méandres de ses souvenirs, où l'évocation de l'ami fidèle nous servira de guide. ». Dominic Tardif, dans Le Devoir, 4 juillet 2015 a rendu compte chaleureusement de L’école des chiens. Il a souligné qu’avec ce récit, l’auteur avait produit « de la vraie littérature » : « Plus qu’un livre sur un maître et son animal, L’école des chiens célèbre le pouvoir de l’écriture qui, chez Daniel Guénette, n’aspire pas à remplacer l’en allé, mais bien à en continuer la vie. » Recommandé avec enthousiasme à ses téléspectateurs, L’école des chiens a fait l’objet d’un échange de cadeaux à l’émission LIRE présentée sur ARTV. À partir de 1975, l’auteur a collaboré à diverses revues de littérature à titre de poète et de critique. On a pu lire ses recensions dans la revue Mœbius. Pour l’une d’elles, l’auteur a été finaliste au Prix d’excellence de la SODEP 2016, dans la catégorie Texte d’opinion critique sur une œuvre littéraire ou artistique. Plus récemment, l’auteur a publié deux nouveaux titres en poésie, Varia au Noroît en 2018 et, à l’hiver 2023, La châtaigneraie aux Éditions de la Grenouillère. Pour ce recueil, le poète a été finaliste au Prix d’excellence du webmagazine La Métropole. Dans la recension que réserve à cet ouvrage la revue LQ, le critique Antoine Boisclair écrit: « Ce recueil émouvant, très maîtrisé du point de vue formel, témoigne d’un savoir-faire indéniable. » Le critique et poète français Pierre Perrin écrit dans sa revue trimestrielle de littérature, la revue française « Possibles », ne pas confondre avec la revue québécoise du même nom : « Daniel Guénette a le vers sûr, souvent proche de l’alexandrin, parfois très bref. Il sait restituer une vie, avec sa foudre, ses éclairs, et les moments de calme, voire de communion. La Châtaigneraie constitue un beau recueil presque filial. » Pour sa part, dans Le Ou'tam’si magazine, Nathasha Pemba déclare que « La châtaigneraie est un recueil de poésie qui a l’allure d’un hommage, d’un renouvellement du contrat amical. C’est une poésie ontologique qui va au fond des choses pour faire émerger l’être. Daniel Guénette une fois plus confirme qu’il est poète, le poète de l’amitié, le poète de l’altérité, le poète de l’éternité. » Outre ces recueils de poésie, l’auteur fait paraître quelques nouveaux romans. De Miron, Breton et le mythomane, paru en 2017 à La Grenouillère, Dominic Tardif écrit dans Le Devoir : « Chronique des glorioles imaginaires d’un grand taquin aimant (se) conter des histoires et fabuler une légendaire vie d’aventures, Miron, Breton et le mythomane est le carton d’invitation d’une fête organisée en l’honneur du mensonge auquel s’abreuve n’importe quelle forme de littérature digne de ce nom. » Pour sa part, Dédé blanc-bec reçoit dans Nuit Blanche un commentaire signé Gaétan Bélanger : « Le ton poétique empreint d’humour et de nostalgie adopté par l’auteur rend extrêmement agréable la lecture de ce roman émouvant. Il faut préciser que, tout d’abord, il est un peu déroutant de suivre les bonds fréquents de la narration dans le temps. Plus que de simples digressions, elles donnent parfois l’impression que l’auteur saute du coq à l’âne pour revenir aux mêmes événements, observés sous un angle différent. Mais on s’habitue vite à cette manière ou à ce style et on l’apprécie pour son originalité. Voilà donc un roman au texte minutieusement poli et se démarquant par sa qualité et son audace. » Vierge folle est le dernier roman de l’auteur. La recension parue dans Culture Hebdo se termine avec ces mots : « Nous vous laissons le soin de découvrir la conclusion. Excellent, est un euphémisme. On a adoré. » Ce roman, sans doute le meilleur de l’auteur, s’il a suscité l’enthousiasme de ses lecteurs n’a guère fait l’objet de recensions sérieuses. Pour des recensions sérieuses, il aura fallu attendre l’hiver 2023. Au billet d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie, se sera ajoutée dans Le Devoir une chronique de Louis Cornellier consacrée non pas à un roman ou un recueil, mais à un essai. Le journaliste y salue d’abord le travail entrepris par l’écrivain sur son blogue : « Fin lecteur de poésie, l’écrivain s’y impose comme un critique raffiné, érudit et amical dont le style, limpide et élégant, s’apparente à celui de la conversation relevée. Ces qualités en font une rareté dans le paysage littéraire québécois. » Puis, il rend compte de l’essai : « Dans Le complexe d’Orphée (Nota bene, 2023, 186 pages), l’écrivain se fait plus essayiste que critique en proposant « une manière de promenade » dans laquelle il tente « de saisir la nature de la poésie ». Fidèle à son approche modeste et exploratoire, il déambule en compagnie des poètes et penseurs qu’il aime afin de délimiter son objet, tout en cultivant le souci de ne pas l’enfermer. » Il conclut sa chronique en ces termes : « Partisan des « poèmes limpides » qui disent de « simples vérités », Guénette trouve dans la poésie un antidote « à l’endormissement de [ses] facultés » ou, comme l’écrit Valéry, un discours « chargé de plus de sens, et mêlé de plus de musique, que le langage ordinaire n’en porte et n’en peut porter ». Fénelon aurait aimé ce livre admirable. » La conclusion de l’article d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie était elle aussi plutôt réjouissante : « Romancier accompli (son dernier récit, Vierge folle, est paru en 2021 aux éditions de La Grenouillère), critique littéraire important (son blogue, intitulé Dédé blanc-bec, offre des comptes rendus très étoffés sur des publications québécoises), Daniel Guénette est aussi un poète qui mérite toute notre attention. »

2 réflexions sur « ENTRETIEN DE L’AUTEUR SAUVÉ DES EAUX »

  1. Encore une référence au cinéma français: Boudu sauvé des eaux, vieux film de Renoir si je ne me trompe pas, avec Michel Simon. Rescapé, écrire est donc encore possible.

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    1. Ce film est magnifique. Michel Simon était un énorme acteur. Oui, vous avez raison, écrire demeure possible, mais exige sans doute autant d’esprit critique que de passion, autant de retenue que de débordement. Voyez, cette eau qui déborde. Il faut éviter de noyer le poisson.

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